dimanche 17 novembre 2013

Internet et le piratage

Sur les 2 milliards d’internautes que compte la planète, un quart d’entre eux seraient des pirates. Plus précisément, 432 millions d’internautes utiliseraient leur accès internet pour accéder à des contenus protégés par le droit d’auteur, sous copyright. (Etude NetNames, pour le compte de NBC Universal - janvier 2013).

La bande passante consommée pour ce « trafic » serait équivalente à 9,567 petabytes par mois en 2012, principalement via Bittorrent, et constituerait le quart de l’ensemble du trafic internet.

Sur ce média particulier qu’est Internet, la frontière entre piratage et partage est nécessairement floue. D’une part, le partage effectif qui met nécessairement en œuvre l’essentiel des actions dites de « piratage », désamorce symboliquement, pratiquement et sociologiquement l’idée d’un profit exclusivement personnel au détriment d’une collectivité ou des intérêts de la majorité.

D’autre part, le partage nécessite de plus en plus fréquemment de convoquer une dimension et des actions de piratage pour suspendre, contourner ou détruire les « mesures techniques de protection » rendant de fait impossibles ou extrêmement compliquées l’essentiel des actions pourtant légitimes de partage sur un bien culturel dûment acquitté.

La matrice - Film Matrix (réalisé par Andy et Lana Wachowski, 1999)

Les deux seuls remèdes efficaces sont pourtant déjà connus

Constitution de portails d’une offre légale suffisamment fournie et tarifairement accessible pour être attractive, ce qui impose une révision façon « table rase » de l’antique « chronologie des médias » ; et surtout, surtout, la légalisation des échanges (du partage) non-marchands, accompagnée d’une réflexion autour des biens communs informationnels.

Si le phénomène du « piratage » ne peut être nié, que dire de l’étendue, de l’échelle et de l’impact des actions menées par les différents « corsaires » à la solde des industries culturelles ? Une infographie récente laissait voir l’étendue du problème d’un autre piratage, celui-là authentique, celui de nos données personnelles ou de données économiquement sensibles.

Au-delà des actes de piraterie réels (intrusions informatiques) ou des négligences qui sont à l’origine de certaines fuites (« leaks »), il est troublant de constater à quel point les acteurs présentés comme disposant des cartes permettant de régler le problème du piratage pour le compte des industries culturelles (c’est-à-dire les moteurs de recherche), entretiennent avec nos données les mêmes pratiques de captation, de détournement et de partage que celles auxquelles ils sont enjoints de mettre fin dans le domaine des industries culturelles : l’appropriation et le partage avec des services tiers de nos données « personnelles » est, de leur aveu propre, le seul moyen de présenter aux usagers des services en cohérence avec leurs attentes.

L’essentiel des actes de « piraterie » dénoncés à grands cris par NBC ou la MPAA ne poursuivent pas d’autre but que celui-ci : faute d’une légalisation du partage non-marchand et d’une offre légale à la fois conséquente et adaptée à la chronologie des usages de consommation sur le Web, c’est le seul moyen à portée des internautes pour disposer de services enfin en cohérence... avec leurs attentes....

World's Biggest Data Breaches (losses greater than 30,000 records) - Source Information is Beautiful


Cet extrait d'article est tiré du blog Affordance, d’Olivier Ertzscheid, maître de conférences en sciences de l’information. L’article est consultable en intégralité sur le blog.

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