samedi 12 octobre 2013

Georges Rousse (1947-)

Georges Rousse, photographe plasticien, est né en 1947 à Paris où il vit et travaille.

Habiter le monde avec son appareil photographique

Depuis le Noël de ses 9 ans où il reçut en cadeau le mythique Brownie Flash de Kodak, l'appareil photo n'a plus quitté Georges Rousse. Alors qu'il est étudiant en médecine à Nice, il décide d'apprendre chez un professionnel les techniques de prise de vue et de tirage puis de créer son propre studio de photographie d'architecture. Mais bientôt sa passion le pousse à se consacrer entièrement à une pratique artistique de ce médium sur la trace des grands maîtres américains, Steichen, Stieglitz ou Ansel Adams. 

C'est avec la découverte du Land Art et du Carré noir sur fond blanc de Malevitch que Georges Rousse choisit d'intervenir dans le champ photographique établissant une relation inédite de la peinture à l'Espace. Il investit alors des lieux abandonnés qu'il affectionne depuis toujours pour les transformer en espace pictural et y construire une œuvre éphémère, unique, que seule la photographie restitue. 


Pour permettre aux spectateurs de partager son expérience de l'Espace il présente, dès le début des années 80, ses images en tirages de grand format. Cette œuvre forte et singulière qui déplace les frontières entre les médias traditionnels s'est immédiatement imposée dans le paysage de l'art contemporain. Depuis sa première exposition à Paris, à la galerie de France en 1981, Georges Rousse n'a cessé d'exposer et d'intervenir dans le monde entier, en Europe, en Asie (Japon, Corée, Chine, Népal.), aux Etats-Unis, au Québec, en Amérique latine..., poursuivant son chemin artistique au-delà des modes.

Il a participé à de nombreuses biennales - Biennale de Paris, Biennale de Venise, Biennale de Sidney. - et reçu des prix prestigieux :

1983 : Villa Médicis "hors les murs" à New York
1985 -1987 : Villa Médicis, Rome
1988 : Prix ICP (International Center of Photography), New York
1989 : Prix de Dessin du Salon de Montrouge
1992 : Bourse Romain Rolland à Calcutta
1993 : Grand Prix National de la Photographie
2008 : Georges Rousse succède à Sol Lewitt comme Membre associé de l'Académie Royale de Belgique

Il est représenté par plusieurs galeries européennes et ses œuvres font partie de collections majeures. 


Une brève présentation du travail de Georges Rousse

Georges Rousse est un photographe plasticien. Ses images viennent clore un processus qui relève à la fois de la peinture, de l'architecture et du graphisme. Il joue sur la différence entre le fond, essentiellement le lieu où il s'est installé, et l'image, flottant à la surface du lieu de l'installation. Son travail invite à méditer sur la réalité et l'illusion.

Le travail s'effectue en deux temps.

1er temps : montage d'une forme simple

Les lieux privilégiés des interventions de Georges Rousse sont les bâtiments désaffectés. Il visite d'abord le bâtiment, prend des notes, qui peuvent donner lieu à un montage préparatoire, éventuellement au moyen de l'ordinateur.
Une fois le projet fixé, la réalisation du volume est accomplie avec le concours d'assistants, souvent recrutés pour l'occasion. 
La réalisation proprement dite commence par une mise au noir du lieu. Toutes les entrées de lumière sont obturées et une projection diapositive est faite : elle permet l'inscription de la forme plate dans l'espace qu'elle doit envahir. Dans l'exemple illustré ci-dessous le cercle plat se projette sur les sols, les murs et plafond. Les assistants armés de crayons ou de craie prennent les repères des bords de forme.
Après repérage, tous les éléments pris à l'intérieur des repères seront peints en vert.
D'autres éléments découpés (comme ces croissants de bois, ou comme cette cloison qui suit le bord droit du cercle) peuvent être ajoutés avant ou après la projection de sorte de venir compliquer un peu plus l'illusion visée. 


La réalisation de l'illusion est un gros travail, qui peut intégrer un aspect très décoratif, comme on le voit sur la façon de peindre le mur de droit à l'avant-plan de l'image. Georges Rousse est passé par la Villa Medicis et le goût italien ne lui est pas étranger !

2ème temps : reproduction photographique

Lorsque la préparation de l'installation est achevée, une chambre photographique vient remplacer, exactement au même endroit, le projecteur de diapositive. L'illusion sera ainsi parfaite, et la qualité de la photographie, destinée à des agrandissements importants, sera optimale.

Interrogé sur sa façon de procéder Georges Rousse souligne l'importance du moment de la prise de vue :
"En règle générale, je m'applique seulement à trouver la meilleure relation entre toutes les données contextuelles, la singularité du site, le budget, le temps, les moyens techniques, etc. Mon unique projet est de transformer le lieu, de tout mettre en œuvre pour cet instant de la prise de vue qui est un moment extrême dans la relation intime de l'espace à la peinture, à la photographie et à moi-même." Lorsque la photographie est faite, enfin, le décor qui a servi à sa fabrication peut être détruit.



Intérêt du travail

Georges Rousse témoigne du même goût pour l'espace dont témoignait les artistes de La Renaissance. La soif de l'espace, qui est soif de connaissance, aime son contraire, le doute fondamental de l'illusion.

Si Georges Rousse est à la fois concepteur, installateur, peintre et à ce titre plasticien, il n'en demeure pas moins que l'essentiel de son travail joue sur le point de vue et le passage de la réalité en trois dimensions à l'illusion en deux dimensions. En mettant le relief au service du monde plat, il inverse la relation de sujétion entre la photographie et le monde (ce n'est pas la photographie qui représente le monde, c'est le monde qui concourt à la photographie), introduisant au-delà de la simple illusion d'optique une tricherie vertigineuse dont l'analyse fait le bonheur du regard qui interroge la représentation proposée.

"N'est-ce pas le projet de l'artiste que de montrer le réel de façon imprévue ?" interroge Georges Rousse. Il a probablement raison même si, dans son cas, on est déjà beaucoup plus loin. Quel est donc ce réel, enrôlé dans un mécanisme de trahison de la perception, qui nous convie à douter de nos sens ?


Source: Henri Peyre sur le site : http://www.galerie-photo.com
Site internet de Georges Rousse: http://www.georgesrousse.com/