samedi 22 juin 2024

Combien y a-t-il eu d'humains depuis que la Terre existe ?

Depuis l'apparition de notre espèce il y a environ 200 000 ans, combien d'humains ont foulé le sol de notre planète ? Il est difficile à répondre avec précision a cette question fascinante, mais les scientifiques ont utilisé des estimations démographiques et archéologiques pour arriver à une estimation approximative.

Le "Population Reference Bureau" (PRB), un centre de recherche basé à Washington, fournit une estimation du nombre d'hommes et de femmes qui auraient vécu sur Terre : 108 milliards d'humains ont vécu sur la Terre. Mais ce nombre, dernièrement mis à jour en 2011, reste très approximatif, comme on peut facilement l'imaginer. "L'on ne dispose d’absolument aucune donnée démographique pour 99% de l'existence de l'humanité sur la Terre", précise le PRB. Alors comment les démographes ont-ils procédé ? Ils ont appliqué, selon leurs propres termes, une méthode "semi-scientifique", dans la mesure où il ont dû établir des suppositions sur les populations nées avant notre ère. Ils ont raisonné par "grandes périodes", en se basant sur les estimations officielles des taux de natalité (fournies par les Nations Unies, des études, etc.) et des hypothèses là où les données manquent, c'est-à-dire dans la plupart des cas.


Leur première estimation de la population remonte à 8 000 ans avant Jésus-Christ. "À l'aube de l'agriculture, la population du monde se situe alors aux alentours de 5 millions", expliquent-ils. Au cours de ces huit millénaires avant Jésus-Christ, le taux de croissance est très faible - de seulement 0,0512% par an - pour arriver à environ 300 millions en l'an 1 de notre ère. "Selon toute vraisemblance, les populations humaines des différentes régions ont augmenté ou diminué suite aux famines, aux aléas des troupeaux d'animaux, aux hostilités et aux changements de conditions atmosphériques et climatiques", avancent les chercheurs. Et à l'époque, la vie est de très courte durée : par exemple, en France, durant l'Âge de Fer (de 1.100 à 700 avant JC), l'espérance de vie à la naissance est en moyenne de... 10 à 12 ans ! La mortalité infantile est très élevée, "peut-être de 500 décès de nourrissons pour 1.000 naissances, voire davantage", estiment les démographes. Vers l'an 1 de l'ère chrétienne, le nombre total d'êtres humains vivant sur la planète est évalué à 300 millions. Vers 1650, la population mondiale augmente probablement jusqu’à 500 millions environ, ce qui ne représente pas une forte hausse depuis plus de 1.000 ans, entre autres parce qu'en Asie occidentale puis en Europe, la peste noire sévit. Enfin, vers 1800, la population mondiale dépasse le cap du milliard de personnes et continue de s'accroître depuis, atteignant un peu près de 7,5 milliards en 2017.

Selon le PRB toujours, la population actuelle représente donc 6,5% de toute celle née dans l’histoire de l’humanité. Ce qui "démonte une bonne fois pour toutes un mythe persistant depuis les années 1970, à savoir que 75 % de toutes les personnes nées sur la Terre depuis l'histoire de l'humanité étaient en vie à ce moment-là", ajoutent les démographes.

Cependant, il est important de noter que cette estimation est basée sur des hypothèses et des données incomplètes, et doit donc être prise avec précaution.

La grande majorité de ces humains ont vécu au cours des derniers millénaires, car la population humaine a connu une croissance exponentielle au cours des derniers siècles. En effet, il a fallu des milliers d'années pour que la population humaine atteigne un milliard d'individus, ce qui s'est produit au début du XIXe siècle. Depuis lors, la population a augmenté rapidement, atteignant deux milliards en 1927, trois milliards en 1960, quatre milliards en 1974, cinq milliards en 1987 et six milliards en 1999. Aujourd'hui, la population mondiale est estimée à environ 7,9 milliards d'individus.

Il est intéressant de noter que la croissance démographique n'a pas été uniforme dans le monde. Certaines régions, comme l'Europe et l'Amérique du Nord, ont connu une croissance démographique plus lente ces dernières décennies, tandis que d'autres régions, comme l'Afrique subsaharienne, continuent de connaître une croissance rapide.

La croissance démographique rapide a également des conséquences importantes sur l'environnement et les ressources naturelles de la planète. Les scientifiques estiment que la population mondiale pourrait atteindre 9,7 milliards d'ici 2050, ce qui exercera une pression encore plus grande sur les écosystèmes et les ressources naturelles de la Terre.

vendredi 7 juin 2024

Aphrodisia - Jean Joubert (1928-2015) avec Raphaël Ségura (1941-)

Aphrodisia se lève avec le jour

à l’heure de la dernière étoile,

de la première rosée.

Sur la terrasse, face à l’aurore,

elle tend ses lèvres roses,

darde ses seins fardés de lune,

ouvre sa vulve souveraine

pour que l’aube la pénètre.

 

Amour avec le soleil.

 

Le soleil est-il un dieu?

Aphrodisia gémit, soupire.

 

*

 

De ses robes, Aphrodisia

n’a certes que peu d’usage.

Ni bijoux ni fards ni voiles,

Aphrodisia se veut nue

comme les roses du jardin

comme les fruits de son verger

- pommes, poires, figues fendues –

comme le serpent qui, la nuit, se glisse

entre les cuisses d’Aphrodisia.

 

Entre les seins d’Aphrodisia

la rosée risque une perle

qui glisse et roule

jusqu’au très sombre buisson

où, dans l’amour,

perle et luit

la rosée d’Aphrodisia.

 

*

 

Aphrodisia, la nuit, se glisse

dans le lit du solitaire,

lève le drap,

chevauche le dormeur

qui, besogné, voit dans son rêve,

penchée sur lui,

la chevelure de l’orage.

 

*

 

Dans le chœur du lit défait,

Aphrodisia, agenouillée,

adore le lingam:

le petit dieu, frère d’Eros.

Ni prêtre ni sacrifice

ni cierge ni oraison

mais un murmure,

un soupir,

la salive d’un baiser.

 

*

 

« L’homme est un arbre, dit-elle :

berger, peintre, poète

sont les arbres de mon verger.

 

J’aime l’homme de sang, de sève,

sa chevelure de feuilles.

 

Je l’accole, je l’embrase,

Je le fleuris de baisers. »

 

*

 

« Aphrodisia, dit l’amant,

tu t’ouvres comme la forêt,

tu foisonnes, tu t’enténèbres.

Ah ! profondes voluptés.

 

Dans ton corps béant je voudrais

comme un chasseur solitaire

forcer le cerf, traquer la mort

avec une meute de loups. »

 

*

 

« Voyez ! dit Aphrodisia,

pour vous je m’ouvre comme un livre,

ardente, j’offre à vos yeux

la page fauve sous le poil.

Voyez, lisez !

Je suis naissance,

je suis mystère et volupté,

désir, terreur et tombe rose.

Dans mes replis rusés s’écrivent

le commencement et la fin. »

 

*

 

« Un prêtre ensoutané de suie et d’anathème

crie que grouillent dans ma bouche

crapauds, scorpions et vipères,

qu’à la pointe de mes seins

luisent les yeux du démon

et que mon sexe est porte de l’enfer.

 

Le vent déchire ces paroles.

Avec un grand rire de feuilles

la terre soulevée m’étreint et me féconde. »

 

*

 

Au sommet de la colline,

sous la lune pleine et rouge,

Aphrodisia, sorcière nue,

a rendez-vous avec le Diable.

Mais ce qui soudain sort de l’ombre,

la saisit et la chevauche,

est-ce le Diable en personne

ou le berger du troupeau

ou bien encore,

velu, barbu, cornu,

le grand bouc noir?

 

Un nuage couvre la lune.

 

Lorsqu’elle va vers la mer

Aphrodisia, sur le sable,

laisse de vives griffures:

signature d’une louve.

 

Griffes de louve et dents de louve,

Aphrodisia dans l’amour

aime mordre ses amants.

Prends garde, berger volage,

Aux rages d’Aphrodisia.

 

*

 

« Je suis printemps, dit-elle,

je suis terre embrassée,

jardin.

 

Je suis jardin:

sombres iris, chevelure,

pupille, pensée, pervenche,

bouche baisée, coquelicot,

bulbe des seins, jacinthes mauves,

ventre corolle de désir,

toison de fièvre, de fougère

où règne la rosée.

 

Et mon sexe épanoui de rose triomphante. »

 

*

« Amant velu, barbu, brutal

qui crois connaître tous les jeux

je t'apprendrai de plus profonds mystères :

feu souterrain, cavernes blanches,

vertiges et voluptés.

Je t'apprendrai que dans le corps

et dans l’au-delà du corps

se mêlent et se marient

la rose de chair et la rose mystique. »

 

Ainsi parle Aphrodisia.

 

Extrait de " Longtemps j'ai courtisé la nuit "