Léonard de Vinci - Croquis pour hélicoptère |
"La plus belle expérience que nous puissions faire", disait Einstein, "est celle du mystère, la source de tout vrai art et de toute vraie science".
On considère souvent l’art radicalement différent de la science, comme opposé à la science, comme l’émotion à la raison. On imagine que la froide lucidité, l’aride objectivité de la démarche scientifique, qui révèle la réalité du monde, s’oppose aux tumultes irrationnels, aux sentiments d’étrangeté que produit la démarche artistique, qui révèle la manière dont nous percevons le monde.
Mais c’est une notion récente. L’un des plus grands traités de connaissance scientifique qui nous soit parvenu date d’il y a plus de 2000 ans. Il s'agit d'un poème écrit en vers, "De natura rerum", "de la nature des choses" de Lucrèce, qui mêle l’art et la science.
"Le beau est la splendeur du vrai" disait Platon. "Rien n’est beau que le vrai" disait Boileau, "Rien n’est vrai que le beau" répondait Musset. Et le poète Keats refusant toute relation de hiérarchie les faisait rentrer en résonance, "La beauté est vérité", disait-il, "la vérité est beauté".
Durant l’Antiquité, durant la Renaissance, durant les Lumières, art sciences et philosophies étaient souvent associés et mêlés. Léonard de Vinci était peintre et ingénieur. Goethe faisait des travaux scientifiques sur la lumière et le développement des plantes. Il y a à la source de la création scientifique et à la source de la création artistique ce mystère, cette étrangeté, cette incertitude, ce vacillement dont parle Einstein.
Comprendre et ressentir, imaginer, rêver... Ressentir permet de mieux comprendre et comprendre permet de mieux ressentir. Le contact avec une œuvre d’art nous permet d’accéder à un monde intérieur, le monde intérieur de l’artiste. Combien de façons différentes, inconnues, toujours nouvelles de vivre et de ressentir. S’émerveiller de ce qu’une autre personne qui peut avoir disparu depuis longtemps nous donne à voir, à entendre, à ressentir, à comprendre, à partager.
De "je" à "tu", de "je" à "nous". Là où la science décrit de l’extérieur, parle de nous et du monde à la troisième personne du singulier, parle de nous en disant "il" ou "elle" ou "eux", le contact avec une œuvre d’art nous permet de ressentir qu'il y a une parole de "je" à "tu", de "je" à "nous" par delà l’espace et le temps, par delà la mort. Un dialogue au-delà du langage, en deçà du langage, dans le langage des sons, des formes, des images, des couleurs, des mouvements.
L’émotion artistique fait appel en nous à quelque chose de plus ancestral, de plus précoce dans notre vie que l’abstraction. Darwin disait que "l’émotion, la sensation de beauté est à l’origine et au cœur de ce qui nous faisait humain".
"Les plaintes de la souffrance sont à l’origine du langage" disait Raymond Queneau mais probablement aussi la joie, l’affection, l’attachement, l’amour, la découverte éblouie du monde et des autres, le sourire et le regard d’une mère avant même la compréhension du sens des mots qu’elle prononce.
"Nous sommes de cette étoffe sur laquelle naissent les rêves", disait Shakespeare "et nos rêves naissent longtemps avant que nous ne sachions de quoi cette étoffe est faite".
On considère souvent l’art radicalement différent de la science, comme opposé à la science, comme l’émotion à la raison. On imagine que la froide lucidité, l’aride objectivité de la démarche scientifique, qui révèle la réalité du monde, s’oppose aux tumultes irrationnels, aux sentiments d’étrangeté que produit la démarche artistique, qui révèle la manière dont nous percevons le monde.
Mais c’est une notion récente. L’un des plus grands traités de connaissance scientifique qui nous soit parvenu date d’il y a plus de 2000 ans. Il s'agit d'un poème écrit en vers, "De natura rerum", "de la nature des choses" de Lucrèce, qui mêle l’art et la science.
"Le beau est la splendeur du vrai" disait Platon. "Rien n’est beau que le vrai" disait Boileau, "Rien n’est vrai que le beau" répondait Musset. Et le poète Keats refusant toute relation de hiérarchie les faisait rentrer en résonance, "La beauté est vérité", disait-il, "la vérité est beauté".
Durant l’Antiquité, durant la Renaissance, durant les Lumières, art sciences et philosophies étaient souvent associés et mêlés. Léonard de Vinci était peintre et ingénieur. Goethe faisait des travaux scientifiques sur la lumière et le développement des plantes. Il y a à la source de la création scientifique et à la source de la création artistique ce mystère, cette étrangeté, cette incertitude, ce vacillement dont parle Einstein.
Comprendre et ressentir, imaginer, rêver... Ressentir permet de mieux comprendre et comprendre permet de mieux ressentir. Le contact avec une œuvre d’art nous permet d’accéder à un monde intérieur, le monde intérieur de l’artiste. Combien de façons différentes, inconnues, toujours nouvelles de vivre et de ressentir. S’émerveiller de ce qu’une autre personne qui peut avoir disparu depuis longtemps nous donne à voir, à entendre, à ressentir, à comprendre, à partager.
De "je" à "tu", de "je" à "nous". Là où la science décrit de l’extérieur, parle de nous et du monde à la troisième personne du singulier, parle de nous en disant "il" ou "elle" ou "eux", le contact avec une œuvre d’art nous permet de ressentir qu'il y a une parole de "je" à "tu", de "je" à "nous" par delà l’espace et le temps, par delà la mort. Un dialogue au-delà du langage, en deçà du langage, dans le langage des sons, des formes, des images, des couleurs, des mouvements.
L’émotion artistique fait appel en nous à quelque chose de plus ancestral, de plus précoce dans notre vie que l’abstraction. Darwin disait que "l’émotion, la sensation de beauté est à l’origine et au cœur de ce qui nous faisait humain".
"Les plaintes de la souffrance sont à l’origine du langage" disait Raymond Queneau mais probablement aussi la joie, l’affection, l’attachement, l’amour, la découverte éblouie du monde et des autres, le sourire et le regard d’une mère avant même la compréhension du sens des mots qu’elle prononce.
"Nous sommes de cette étoffe sur laquelle naissent les rêves", disait Shakespeare "et nos rêves naissent longtemps avant que nous ne sachions de quoi cette étoffe est faite".
Extrait de l'émission de radio "Sur les épaules de Darwin"
Concue et présentée par Jean-Claude Ameisen
Episode "Pierres de rêves" diffusée sur France Inter le 27.11.2010
Episode "Pierres de rêves" diffusée sur France Inter le 27.11.2010
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire